L’être humain éternellement créatif, l’Homo Ludens, a cherché des voies d’expression toujours plus larges à travers toute l’histoire et toutes les cultures. De cette façon, il exprime la liberté dont l’âme a besoin ; une liberté qui est indépendante des structures et des modèles contraignants, indépendante de l’exercice du pouvoir par les autres.[1]
Mais les limites de l’expression dans le temps et l’espace font de ce monde un lieu inadapté au fait de tenter d’exprimer la vraie liberté. Ce monde exige un but, une structure, une forme et une loi, et ne permet aucune interférence ou menace à la stabilité globale du champ de vie. En fait, il n’y a pas d’espace dans ce monde pour l’expression de la vraie liberté.[2] L’histoire nous a appris comment toute expression de liberté est impitoyablement attaquée et éliminée, à l’exception rare d’une ou l’autre œuvre d’art dont la beauté et le reflet de valeurs supérieures ont réussi à éviter ces forces de l’ignorance.
La principale raison de la position très problématique de la liberté est qu’elle n’est pas, et ne peut pas être, une valeur absolue dans le monde. La mythologie grecque raconte l’histoire bouleversante du patriarche Ouranos, défenseur de la liberté dans le Cosmos, qui possède cette capacité de protection, privé de liberté par son fils Chronos, voire même « déclassé » par celui-ci, disant en quelque sorte :
La liberté que tu défends apporte le Chaos, et ne soutient pas du tout le Cosmos : j’exige l’ordre, la structure, le système et la régularité !
Platon est d’accord et nous sommes, comme l’indiquent des notes de bas de page de Platon, divisés et exilés aux confins de ce monde.
La liberté est liée au monde d’Ouranos (Uranus en latin), le souverain de la constellation du Verseau, et son influence s’approche de nouvelles possibilités en cette période de transition, qui représente en même temps une période de « fin » pour les impulsions de l’ère des Poissons.
Dans le christianisme, qui est jusqu’à présent une expression de l’ère des Poissons, il est dit :
Là où est l’Esprit du Seigneur, là est la liberté.
Il est également dit que :
L’esprit du Seigneur (Christ) n’est pas de ce monde.
De temps en temps, les flammes d’Uranus se réveillent, comme au début d’une révolution vers l’an 1789 : son slogan était « liberté, égalité, fraternité ». À la fin du XVIème siècle et au début du XVIIème siècle, nous avons vu les flammes des Lumières naissantes en Europe, et le slogan de la liberté a également été entendu dans les années 1960. Pourtant, ce sentiment de liberté s’oppose frontalement à l’oppression, à la coercition, à l’esclavage et à d’autres restrictions et obstacles. Il s’agit avant tout de « se libérer de » et non d’ »agir à sa guise ». « Se libérer de » peut être vécu comme une invitation à l’expression et à la créativité, comme une absence de contrainte, dans la présence et la réalisation de soi, comme une activité transformatrice et co-créatrice d’un « ordre » supérieur différent, même si les abus initialement combattus et réprimés étaient d’origine céleste.
Les impulsions du Verseau portent en elles les possibilités d’expression d’une liberté totale, qui sont étroitement liées à l’élévation de la conscience, elle-même aspect de ces influences. La liberté absolue ne peut être célébrée en tant qu’expérience séparée, en raison des limitations de ce monde dualisé. Mais en connexion avec l’amour et l’unité, la liberté atteint sa dimension spirituelle universelle. Cependant, en tant qu’expérience individuelle séparée, elle se heurte aux impossibilités présentes à notre niveau de réalité. Dans son contexte le plus pur, en tant qu’aspect de l’unité et de l’amour, elle peut pousser la conscience à faire usage des opportunités de réalisation.
C’est à partir de l’expérience spirituelle pure que cette connexion « liberté, unité, amour »[3] peut être qualifiée d’indestructible, car elle est de nature électromagnétique, d’un « ordre » supérieur, non terretre, et rend la liberté d’Uranus aux âmes humaines.
L’ère du Verseau peut être caractérisée par la tri-unité de l’amour, de la liberté et de l’unité, car ils forment une harmonie organique en relation les uns avec les autres : il ne peut y avoir d’amour sans unité, d’unité sans liberté et de liberté sans amour.
Si un « nouvel » esprit, dont les pensées sont « libres », trouve sa base dans les vibrations astrales supérieures, alors cet esprit s’approchera de la « liberté ». Ainsi, la liberté devient un aspect complexe de l’attraction de la pure substance mentale. Les pensées sont libres dans la mesure où les éthers intercosmiques purs sont tirés directement et harmonieusement de la substance primordiale universelle.[4]
Il existe également une possibilité d’expression de la liberté dans la musique si la « volonté terrestre » peut être abandonnée. En général, nous sommes animés par une quête incessante de la satisfaction des besoins et des désirs, et de l’évitement de la douleur et de l’inconfort. Mais parfois, par exemple lorsque vous écoutez de la musique, regardez une œuvre d’art, lisez une poésie ou un bon livre, vous échappez à la tyrannie de la volonté terrestre. Il se crée alors un espace libre, une forme de détachement, et tout désir est temporairement suspendu, et tous les besoins sont brièvement éteints. Comme si l’on observait le monde et soi-même d’une distance détachée (en suivant les traces d’Arthur Schopenhauer).
Dans la pratique de l’improvisation musicale, la liberté individuelle semble être subordonnée à une certaine soumission aux règles (soumission volontaire), afin que l’ensemble reste suffisamment cohérent et harmonieux pour pouvoir « s’élever ».
Par exemple, en respectant les « règles » dans un ensemble, chaque instrument peut explorer de nouvelles lignes mélodiques, tandis que les autres instruments ou voix jouent un rôle de soutien. Il peut également arriver que les instruments « de soutien » soient inspirés pour suivre la nouvelle ligne et entrer dans un nouveau dialogue.[5]
On peut considérer que cela reflète le processus mystérieux de l’expression spontanée de l’âme, mais dans ce cas, il s’agit simplement d’un événement qui « contient de la musique ». Tout comme la « musique des sphères » de Pythagore – apparemment inaccessible et très lointaine. Dans la lumière du Verseau, il s’agit de passer, de l’intérieur, à une vibration supérieure.
Sources :
[1] Huizinga, J. Homo Ludens, 1938.
[2] Rijckenborgh, J. van, Un homme nouveau vient, Rozekruis Pers, Haarlem 2017.
[3] Voir l’article : Les relations humaines à l’aube de l’ère du Verseau – première partie.
[4] Voir l’article : Les relations humaines à l’aube de l’ère du Verseau – seconde partie.
[5] Vrijheid en geluk, Hoe muziek ons leert leven [Liberté et bonheur, Comment la musique nous apprend à vivre], Filosofie Magazine, oktober 2019.